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J’appelai l’esclave : « Bon esclave, lui dis-je, apprends-moi, je te prie, où tu as pris cette pomme. – C’est, me répondit-il en souriant, un présent que m’a fait mon amoureuse. J’ai été la voir aujourd’hui, et je l’ai trouvée un peu malade. J’ai vu trois pommes auprès d’elle, et je lui ai demandé d’où elle les avait eues ; elle m’a répondu que son bonhomme de mari avait fait un voyage de quinze jours exprès pour les lui aller chercher, et qu’il les lui avait apportées. Nous avons fait collation ensemble, et, en la quittant, j’en ai pris et emporté une que voici. »
Alors je luis dis : « Hé ! mon ami, où as-tu pu prendre cette pomme, dis-moi, pour que j’aille moi aussi en acheter de semblables ? » A mes paroles, le nègre se mit à rire et dit : « Je l’ai prise de mon amoureuse ! Comme j’étais allée la voir, et qu’il y avait déjà un certains temps que je ne l’avais vue, je l’ai trouvée indisposée, et à côté d’elle il y avait trois pommes ; et, comme je la questionnais, elle me dit : « Imagine-toi, ô mon chéri, que ce triste cornu de mari que j’ai est parti expressément à Bassra pour me les acheter, et il les acheta pour trois dinars d’or ! » Puis elle me donna cette pomme que j’ai à la main ! »
Je le hélai :
« Comme j’étais là, à la mi-journée, je vis passer un esclave noir qui avait dans la main une des trois pommes avec laquelle il jouait. Je lui demandai d’où il l’avait eue, car je voulais la même. Il se mit à rire : « Je l’ai prise, dit-il, à ma maîtresse. J’étais resté quelque temps sans la voir et, quand je me retrouvai chez elle, elle était malade, avec trois pommes à son chevet. Elle m’expliqua que son mari, ce cornard, était allé pour elle à Bassora où il les lui avait achetées pour trois dinars. J’en ai pris une. »